#22 L’hôpital auxiliaire N°19 - Bolbec 1914-1918
Catégories : Si Bolbec m'était conté
Dans la semaine qui suit la mobilisation du 2 août 1914, la S.S.B.M (Société de Secours aux Blessés Militaires), l’une des composantes de la Croix-Rouge, met en place à Bolbec l’hôpital auxiliaire N° 19 de Seine-Inférieure, zone des Armées N°3.
Cet hôpital auxiliaire est géré par une commission permanente composée des personnalités suivantes : Président : M. Louis LANGER, maire de Bolleville. ; Présidente : Mme la baronne d’ETCHEGOYEN, château de Baclair Nointot ; Vice-présidente : Mme Georges LEMAITRE 3, route du Havre Bolbec ; Vice-présidente : Mme Louis LANGER ; Directrice : Melle PIERARD, infirmière en chef ; Administrateur-Comptable : M. Alfred CARPENTIER 9 rue Pierre Fauquet Bolbec ; Dame de l’Économat : Mme Georges CAPELLE ; Secrétaire-adjoint : M. Armand d’ETCHEGOYEN ; Dame de la lingerie : Mme de CASTELBAJAC ; Adjointe à la lingerie : Melle CARPENTIER ; Médecin-chef : M. le docteur BOUYSSOU, 48 rue Thiers Bolbec ; Médecins traitants : MM. Les docteurs AUGER, maire de Bolbec, 76, rue Léon Gambetta et DESCHAMPS, 23 rue Pierre Fauquet-Lemaitre.
20 lits furent installés dans la salle de l’Amicale laïque au 5 de la rue Lechaptois (salle Debray), et 15 autres à l’hôpital Fauquet au 15 de la même rue.
Des particuliers créèrent de leur propre initiative des annexes : L’annexe des Genêts (20 lits) route de Lillebonne à Gruchet-le-Valasse au château du comte de Castelbajac, l’annexe de Baclair (20 lits) à Nointot au château du baron d’Etchegoyen.
L’annexe St Michel (12 lits) au 39, rue Jacques Fauquet à l’initiative d’Isidore Auger, commerçant, président de la Chambre de commerce de Bolbec.
L’annexe du Val-Ricard (8 lits) dans la salle de lecture au 21 rue du Val-Ricard, chez Eugène Lemaistre et l’annexe Fouache (3 lits) au 12, rue Léon Gambetta à Bolbec chez M. Fouache.
Le 26 août 1914, l’hôpital accueillit ses premiers blessés. Un convoi s’arrêta à la gare de Nointot et 36 soldats descendirent du train sanitaire allant vers Le Havre. Ces soldats provenaient des troupes d’Afrique engagées dans les combats de Charleroi en Belgique. Dès la fin août, une souscription fut lancée pour aider la Croix-Rouge à couvrir les frais de fonctionnement de cet établissement hospitalier, l’aide de l’État (2 francs par jour et par lit) s’avérant insuffisante. Cet appel à la générosité et au patriotisme de la population fut relayé par les journaux locaux, le Progrès et le Journal de Bolbec. Cette souscription dura toute la guerre et permit de récolter au total 119 429 francs soit environ 394 115 €, ce qui témoignait de l’esprit de solidarité bolbécais de l’époque.
Ainsi, au premier anniversaire de la création de l’hôpital on apprit que celui-ci avait accueilli 891 blessés représentant un total de 28 717 journées d’hospitalisation. Lors d’un compte-rendu d’un conseil municipal, on lit que, de novembre 1916 à novembre 1917, l’hôpital N°19 avait fourni 19 128 journées d’hospitalisation représentant des soins donnés à 600 soldats. Tout au long des hostilités, pour distraire les soldats convalescents, le personnel de l’hôpital monta des spectacles (concerts, etc.) auxquels la population de Bolbec était conviée. A la fin de chaque manifestation, des quêtes étaient organisées au profit de l’hôpital.
Parmi les blessés soignés dans cet hôpital, on eut malheureusement à déplorer quelques décès. De grandioses cérémonies funèbres étaient alors organisées par la municipalité pour l’inhumation de ces soldats dont certains reposent encore aujourd’hui dans le carré militaire du cimetière monumental de la ville avec leurs frères d’arme bolbécais tués lors des combats meurtriers.
Des cérémonies de remises de médailles eurent lieu afin d’honorer les soldats blessés qui se sont illustrés dans les combats mais aussi les infirmières pour leur dévouement et les soins qu’elles prodiguent à tous ces soldats. Ainsi, le 17 juin 1916, une cérémonie a lieu dans la salle Debray, décorée pour la circonstance par les soldats blessés où une infirmière de l’hôpital, Mme LECOUTEUR, Sœur St MARC dans la religion, recevait la médaille d’argent des épidémies décernée par le ministère de la Guerre. Dans l’annexe St Michel ouverte par Isidore AUGER, Sœur St MARC accueillait les contagieux. Elle était plus particulièrement chargée du service d’isolement. Elle poursuivit sa tâche jusqu’à la fin de l’année 1915, date à laquelle elle fut terrassée par la maladie qu’elle contracta au chevet de ses malades. Elle fut obligée d’interrompre son service. Son état de santé s’améliorant quelque peu, elle revint à Bolbec pour recevoir cette décoration et l’hommage des élus de la ville, de l’ensemble du personnel et des blessés de l’hôpital auxiliaire N°19.
De même, le 4 août 1917, une importante cérémonie eut lieu à l’hôpital N°19. Le comte de Bagneux, délégué Croix-Rouge auprès de la 3e Région militaire, remit la médaille d’argent des épidémies à Melle PIERARD, infirmière-major et directrice de l’hôpital, pour le dévouement dont elle fit preuve depuis le début de la guerre en prodiguant aux 2 000 blessés et malades qui y furent soignés. Parmi les personnalités présentes, on notait la présence de M. GERNEZ, chirurgien en chef du secteur, qui deviendra le mari de la récipiendaire en octobre 1919.
Le lundi 11 Novembre 1918, l’armistice fut fêté comme il se devait à l’hôpital auxiliaire de Bolbec. Un concert réunit un nombreux auditoire de malades et d’invités. Duos et chants furent goûtés du public, et particulièrement « La Madelon » chanté par un officier et reprise en chœur par les hospitalisés. M. CARPENTIER, administrateur de l’hôpital, rendit hommage aux soldats dans un discours bien pensé et fréquemment interrompu par les applaudissements. Cette cérémonie s’acheva par une « Marseillaise » chantée avec émotion et ferveur.
Le 30 décembre, l’année se termina par la fermeture de l’hôpital auxiliaire N° 19 de Bolbec au cours d’une cérémonie intime où M. LANGER, président du Comité fit l’éloge du dévouement dont les infirmières, les docteurs et les dames veilleuses de nuit firent preuve pendant ces longues années de guerre et les en remercia chaudement. Le Dr BOUYSSOU rappela la marche de l’hôpital 19. M. LANGER et les membres du comité de Bolbec procédèrent alors à la remise de 40 diplômes et insignes de la S.S.B.M. Chacun se sépara ensuite après ces longues années de collaboration, en emportant des souvenirs durables et le sentiment du devoir accompli.