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Un hôtel de ville multiple et au plus près de l’histoire

L’hôtel de ville de Bolbec brille de blancheur au milieu de la bulle de verdure de son jardin. Mais il n’a pas toujours été là et le complexe invisible de bâtiments qui le compose aussi n’a pas toujours existé.

Avant le premier hôtel de ville

Dans la première moitié du XVIIIe siècle, il n’existe pas de maison communale. Le syndic, un notable chargé de représenter les intérêts d’une population, d’une paroisse ou d’une corporation, son échevin, c’est-à-dire son adjoint, et sa communauté se réunissent tantôt au presbytère, tantôt dans la sacristie de l’église.

Au milieu du XVIIIe siècle, cette assemblée se réunit dans « la chambre de la communauté ». La date de l’installation de cette chambre et sa position exacte sont inconnues puisque, le 14 juillet 1765, un incendie ravage la ville, privant le syndic de son lieu de réunion et détruisant les archives qui auraient pu apporter des informations sur le lieu.

En 1772, deux pièces sont louées dans une maison de Mlle Vignerot, dans le fond de la place du marché, proche du Super U actuel, pour en faire “une maison de ville”. L’assemblée s’y sent néanmoins progressivement à l’étroit.

Le premier hôtel de ville

Après la révolution, la nécessité d’un lieu communal est grande. En 1790, le duc d’Harcourt, propriétaire de la place du marché, l’actuelle place Charles de Gaulle, propose alors d’offrir au Conseil Général de la commune une partie de sa possession pour y établir un hôtel de ville. La première pierre est posée le 12 mars 1791 par le premier maire de Bolbec, Jean-Baptiste Gonfray, et le bâtiment est inauguré le 28 août de la même année.

Surélevé, il dispose d’un rez-de-chaussée sur la place du marché et d’un deuxième au niveau de la Grande Rue, l’actuelle rue de la République. Dans le premier se trouvent deux boutiques, un magasin pour la Ville, une prison et un cachot, dans le second trois boutiques, un corps de garde et une pièce pour officiers. Au premier étage prennent place une grande salle d’assemblée, des archives et deux pièces de service.

Le bâtiment est modifié tout au long du XIXe siècle. En 1832, par exemple, est installée une halle à l’avoine au niveau de la place du marché et, en 1834, une bibliothèque est ajoutée à l’étage de cette construction.

De prestigieux invités (1)

Ce premier hôtel de ville a vu s’écouler un pan mouvementé de l’histoire de France et y a même reçu certains de ses acteurs. En 1802, Bonaparte, alors consul, y est accueilli. Il y revient en tant qu’empereur en 1810. Les Bolbécais tiennent une grande cérémonie d’accueil. La foule est nombreuse et les festivités durent jusque tard dans une nuit éclairée par les illuminations.

En 1823, la duchesse de Berry passe aussi à l’hôtel de ville. Épouse du second fils du roi Charles X, elle tente de prendre le pouvoir au cours de la monarchie de Juillet, en 1832. En 1831, Louis-Philippe d’Orléans, roi des Français, et en 1837 son fils, Ferdinand-Philippe, passent tous les deux à Bolbec.

Le deuxième hôtel de ville

Dès 1856, néanmoins, la réussite industrielle de Bolbec, que ce soit sur le plan de la filature et du tissage de coton comme sur celui de la fabrique de mouchoirs, pousse la ville à prendre en importance, à grandir, ce qui mène la municipalité à vouloir construire une nouvelle maison communale. Mais les élus peinent à se mettre d’accord sur la direction et sur le budget à adopter.

En 1872, le projet est abandonné avant d’y revenir neuf ans plus tard, soit en 1881, avec une offre qui change la donne. À la place de construire un nouveau bâtiment, les enfants de Gustave Lemaître, un industriel spécialisé dans la manufacture, proposent de leur vendre leur héritage, une habitation située près de la place du marché. La mairie accepte. Pour 125 000 francs, soit environ 480 000 euros, le bâtiment est racheté. L’administration publique est déplacée à son emplacement actuel, à l’angle de la rue Guillet et de la rue des Martyrs de la Résistance. Les meubles sont acquis à part. Ils sont même toujours présents dans la mairie. De la même manière, certaines pièces n’ont pas été totalement modifiées et rappellent, sous certains aspects, la demeure du manufacturier. Construite en 1806, elle est agrandie en 1850 pour intégrer une salle de billard encore perceptible dans l’actuelle salle des mariages, avec son lustre à hauteur de table.

Le président de la République lui-même, Jules Grévy, signe le décret d’utilité, permettant le changement d’hôtel de ville, le 3 mai 1882. Il est inauguré la même année, le jour de la fête nationale. L’ancien bâtiment est quant à lui démoli et remplacé par des hallettes entre 1883 et 1885.

L’hôtel de ville est alors méconnaissable pour celui qui y est coutumier en 2024. Pour citer quelques exemples, l’horloge du fronton n’est installée qu’en 1930 ; l’entrée se fait par la porte de devant et non, comme aujourd’hui, sur le côté via une extension du bâtiment du fond effectuée en 2018, bâtiment du fond lui-même mis au jour en 1895 pour entreposer le matériel des sapeurs.

Le premier étage est alors occupé par des structures diverses, comme la chambre des Arts et Manufactures jusqu’en 1886 puis par la chambre de commerce jusqu’en 1912. Le second étage comprend la bibliothèque publique et le grenier les archives.

En plus du bâtiment érigé derrière l’ancienne habitation de Gustave Lemaître en 1895, une deuxième structure est mise en place en face de l’hôtel de ville pour permettre aux sapeurs de s’y installer en 1950. Ils ne partent qu’en 1981 pour la rue Jacques Fauquet.

De prestigieux invités (2)

Des invités d’un temps différent sont alors accueillis, ce ne sont plus les bonapartistes, les légitimistes ou les orléanistes du premier hôtel de ville. La république s’est installée et cela se remarque dans les personnalités passant à l’hôtel de ville, notamment avec Jules Ferry, président du Conseil et ministre de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts en octobre 1883 ou avec le président de la République Félix Faure en avril 1895.

Ce sont aussi des personnalités culturelles et médiatiques reçues cette fois des années 1970 aux années 1990. Ainsi viendront l’écrivain Armand Salacrou en novembre 1977, les acteurs Jean Lefebvre et Bernard Ménez et le réalisateur Serge Penard en juin 1978, l’écrivain et journaliste René Andrieu en décembre 1983, le président de l’Assemblée nationale Laurent Fabius en février 1989 et le champion du monde et champion olympique de judo David Douillet en mai 1998.