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Catégories : Si Bolbec m'était conté

A l’heure où vont débuter  les travaux de réaménagement de l’espace public situé entre l’hôtel de ville, la nouvelle médiathèque et le nouveau pôle Famille, nous sommes retournés quelques temps en arrière pour connaître un peu mieux l’histoire de ce lieu et nous apercevoir que la mairie actuelle ne fut pas la première que Bolbec a connue.

 

Autrefois, pour de nombreuses communes, la maison du maire fait très souvent office de mairie. A Bolbec, il semble qu’au XVIIIe siècle, les réunions se tiennent dans le presbytère ou dans la sacristie,  puisque c’est le lieu où, après la messe dominicale, sont élus, chaque année au mois de mars, syndics et échevins, équivalents actuels des maires, adjoints et conseillers municipaux. Après l’incendie de 1765,  la collectivité bolbécaise loue deux pièces dans une maison située dans le fond de la place du marché (du côté du magasin Super U actuel) pour accueillir les réunions et effectuer la gestion administrative de la ville. Mais ces locaux s’avèrent très vite exigus et peu commodes. Il est donc décidé de rechercher une maison en location qui puisse former un véritable hôtel de ville et qui pourrait abriter tout à la fois une salle de réunion du conseil municipal, un corps de garde et une prison.

Devant la difficulté à trouver cette location, le conseil municipal se demande s’il ne serait pas plus pratique et avantageux d’acheter un terrain et d’y construire la future maison commune. Comme cet édifice ne peut être installé que sur la place du marché, centre de vie de la commune, François Henri, duc d’Harcourt , propriétaire de cette place, est sollicité pour l’achat  du terrain nécessaire. Ce dernier cède le terrain sans compensation autre que l’indemnisation des locataires des logettes existantes sur cette portion de la place et le paiement annuel d’une somme de trois livres en argent et d’une mesure de blé. Le détail et le devis estimatif présentés par M. Quevanne de Fécamp étant accepté et un emprunt de 16 000 livres étant autorisé par le département, la construction est attribuée par adjudication au Bolbécais Amable Gand qui a six mois pour construire l’édifice communal. La première pierre est posée le 12 avril 1791 par le maire, Jean-Baptiste Gonfray.

 

Sur le schéma d’implantation de l’Hôtel de Ville daté de 1833 avec l’agrandissement et le bâtiment en demi-cercle réalisé pour accueillir la halle à l’avoine, on voit que la rivière est ouverte le long des maisons de la place du marché avec des ponts pour accéder aux entrées des logements ou des commerces. Dans le fond de la place, à gauche, la grande halle (photo1) qui sera détruite en 1885, au fond de la place, l’Hôtel de L’Europe (photo2)  et, à  gauche de l’hôtel de ville, le belvédère semi-circulaire avec la fontaine ornée de la statue des Arts relevés par le Temps (photo3).

 

Le bâtiment avait soixante six pieds de longueur (21 mètres) sur vingt-deux de large (7 mètres) et une hauteur de trente et un pieds, six pouces (10 mètres). Il fut construit sur la place du marché, à l’emplacement des loges parallèlement à la rue Jean Gilles (rue des Martyrs actuelle). Le rez-de-chaussée qui  formait un sous-sol par rapport à la rue abritait deux boutiques avec cave, un magasin municipal, une prison et un cachot. Le bâtiment en demi-cercle et celui sur lequel il est accolé, visibles sur la carte de droite furent ajoutés en 1834 pour y installer une halle à l’avoine.

 

En 1827 le rez-de-chaussée de l’Hôtel de ville subit quelques modifications afin d’accueillir le bureau de police puis, six ans plus tard, une extension est envisagée pour permettre d’installer, du côté de la place du marché, une halle à l’avoine. Le devis de 7 925 francs est accepté par le conseil municipal. A la séance suivante, Jacques Fauquet, maire propose de profiter des travaux d’agrandissement pour faire aménager à l’étage une bibliothèque. Pour ne pas grever les finances de la ville, Jacques Fauquet s’engage à payer de ses deniers la moitié du montant total de l’adjudication des travaux attribuée à Alphonse Sorieul.

 

 

Les travaux débutent en 1833 et les nouveaux aménagements sont inaugurés en 1834. Dans la bibliothèque, près de 900 volumes sont présentés dans d’immenses vitrines qui ont été déménagées lors de la démolition de cet Hôtel de ville et que l’on peut encore admirer dans la bibliothèque de la mairie actuelle. L’année suivante, un bureau destiné à accueillir une Caisse d’Epargne est aménagé dans l’Hôtel de ville et les premières opérations financières eurent lieu en 1838.

Vers le milieu du XIXe siècle, le commerce et l’industrie devenant florissants et la population de la ville augmentant, il est envisagé de construire un nouvel Hôtel de ville. Cependant le projet va tarder à se concrétiser car l’étude de cette reconstruction par la municipalité n’avance pas. Plusieurs plans et devis sont tour à tour acceptés mais l’emplacement de ce futur Hôtel de ville fait toujours polémique, chaque conseiller ayant une préférence pour tel ou tel emplacement. Certains penchent pour l’emplacement actuel de l’édifice existant, d’autres souhaiteraient le voir implanté au beau milieu de la place du marché, d’autres au fond, d’autres encore sur une nouvelle place à créer (place Félix Faure actuelle).

 

Tout cela fait qu’en 1868, rien n’a encore été fait si ce n’est la création de la nouvelle place (place Félix Faure actuelle) avec l’élévation en son milieu d’une nouvelle halle aux grains inaugurée en 1872 par le maire, M. Guillet. L’aménagement de l’étage de cette halle en mairie sera même envisagé par le conseil municipal en 1878 mais le projet fut abandonné faute de moyens financiers.

Elle choisit de construire le nouvel édifice sur l’emplacement du précédent à une distance de 8 mètres par rapport à la rue et le conseil adopte les plans et devis de 318 600 francs de l’architecte rouennais Oscar Fréret. Cette construction devait s’élever dans l’axe de la rue Guillet, à huit mètres en arrière de la Grande Rue, et se trouver ainsi mi-partie sur l’emplacement de la fontaine et d’une partie sur l’Hôtel de ville de l’époque. Cette combinaison offrait l’avantage de résoudre deux problèmes fort difficiles qui s’étaient d’abord imposés à l’attention du Conseil :   Maintenir l’édifice sur la place du marché et le construire sans avoir recours à des expropriations.

Pour faire face aux dépenses occasionnées par cette construction, on avait songé à maintenir pendant vingt ans encore, les 14 centimes additionnels perçus jusqu’à ce jour pour la Halle aux grains, qui deviennent libres au 31 décembre prochain. Cette combinaison financière, nous ne saurions trop le répéter, n’augmentait donc en rien les impôts actuels. Tout était arrêté, il ne restait plus qu’à obtenir l’assentiment des personnes les plus imposés.  Mais à la réunion suivante du conseil, un événement va venir contrarier ce projet.

 

Comme nous l’avons vu précédemment, le conseil municipal avait adopté en 1881, la construction du nouvel hôtel de ville sur les plans de l’architecte Oscar Fréret. Mais un événement va contrarier ce projet. Quelques instants avant la réunion du conseil municipal, on apprend qu’une magnifique propriété, située place du marché, actuellement indivise entre héritiers, serait peut-être vendue à la ville si celle-ci manifeste l’intention de l’acquérir.

La propriété dont il s’agit, est celle du manufacturier Gustave Lemaitre qui dirigeait les établissements Lemaitre-Lavotte comportant une filature, un tissage et une indiennerie situés au Vivier dans la vallée de Fontaine (emplacement actuel d’Oril Industrie). La maison avait été construite vers 1860 par son grand-père Jean-Baptiste, près de la place du marché dans une propriété qui faisait l’angle avec la rue Pierre-Fauquet-Lemaitre (rue des Martyrs actuelle), la rue Côte Bossaye (ruelle de l’Hôtel de ville et rue Coty actuelles) et la rue de l’ancien champ de foire (rue Charles Sorieul actuelle). La façade de l’édifice avait été modifiée en 1835 et, en 1850, le père de Gustave (nommé lui aussi Jean Baptiste), fit agrandir la maison sur l’arrière pour y aménager une salle de billard (la salle des mariages actuelle). Gustave mourut en 1881, laissant pour héritiers trois enfants : Georges, Valentine et Adrienne.

Finalement, le 8 novembre 1881, le Conseil municipal ratifie à l’unanimité l’acte passé entre le maire de Bolbec et les héritiers Lemaitre faisant cession à la ville moyennant 125 000 francs de la propriété et d’une partie du mobilier présent dans l’habitation. (On peut voir tous ces meubles et bibelots encore aujourd’hui à la mairie).

 

 

Dans un article intitulé « Le futur Hôtel de ville » publié le 13 novembre 1881, le journal « Le Progrès de Bolbec » relate l’événement : «  Sur la proposition de M. le Maire, le Conseil a voté encore à l’unanimité des 21 membres présents à la réunion, l‘achat de la grande et belle propriété appartenant aux héritiers de M. Gustave Lemaitre afin de la convertir en un Hôtel de Ville réunissant tous les services administratifs de notre ville avec promenade et magnifique Jardin public. Voici, du reste, en quelques mots, ce qu’on se propose de faire : le rez-de-chaussée de la maison du maître de cette propriété, comprendra, outre le vestibule et les corridors, sept pièces qui  seront affectées : 1° En une grande et belle salle des mariages et du Conseil.   2° Salon de réception.   3° Salle des Commissions.           4° Bureau du secrétariat. 5° Bureau de l’Etat-Civil. 6° Bureau des Expéditionnaires…

Au premier étage, on trouvera : 1° Une grande pièce pour la bibliothèque.     2° Salle des Prud’hommes. 3° Salle pour la chambre consultative des Arts et Manufactures. 4° Cabinet de Messieurs les adjoints. 5° Cabinet pour les archives des prud’hommes et de la Chambre consultative. 6° Et enfin, les appartements du secrétaire, qui se composeront de chambres, salle et cuisine, complètement isolés de tous les services administratifs et ayant leur entrée particulière,  ruelle Côte-Bossaye. Le grenier sera divisé en : 1° Une vaste pièce pour les archives municipales. 2° Un beau magasin d’équipement et d’armement. 3° Un autre grand magasin de décors et matériel divers.

 

 

L’entrée principale sera rue Pierre Fauquet-Lemaitre et le bâtiment qui se trouve à droite de cette entrée et qu’habitait un concierge sera transformé en bureau de police (N°1 sur la photo) avec, au rez-de-chaussée, une salle des agents, au premier étage, le cabinet du commissaire de police. Le chalet, à gauche, (N°2 sur la photo), à usage de buanderie et grenier à fourrage, sera disposé et aménagé pour recevoir la Justice de paix, à son rez-de-chaussée, on trouvera : le prétoire, salle d’audience pouvant contenir environ 200 personnes assises, et une salle d’attente pour les témoins ; au premier étage, cabinet du juge de paix et celui du greffier, avec une autre petite salle d’attente. La maison du concierge de la place du marché (N°3 sur la photo) restera occupée par le concierge de la Mairie.

Les bâtiments au fond de la cour à droite, à usage d’écuries et remises, auront une entrée particulière cour Sorieul, rue Pierre Fauquet-Lemaitre, et seront transformés, au rez-de-chaussée, en un corps de garde (troupes de passage), avec chambre d’officier, violon pour hommes, violon pour femmes et un très grand magasin pour dépôt des pompes à incendies etc., etc., et enfin, le premier étage sera converti en une seule et belle pièce devant servir de salle de réunion, aux sociétés de secours mutuels et autres et à la Caisse d’Épargne.

Le parc ou jardin qui deviendra une fort jolie promenade publique, a une étendue assez considérable ; en effet, de la rue Pierre Fauquet-Lemaitre il se prolonge jusqu’à la route du Mont-de-Bolbec, sur laquelle s’ouvre une grande porte cochère, ce jardin s’étage en côte et son aspect, ainsi que les points de vue dont on y jouit, sont fort pittoresques, il est encore agrémenté de kiosques, grottes, rochers, serres et orné de riches plantations; on y  trouve aussi une immense et fort belle carrière, avec vastes chambres et spacieuses allées ; cette carrière, qui s’étend bien loin sous les terres, est facile et agréable à visiter. Enfin toute la propriété, avec ses dépendances, a été cédée au prix de 125 000 francs par les vendeurs qui, en considération de l’usage qu’on doit faire, ont consenti à la vendre à un prix relativement peu élevé»

 

 

Le 14 juillet 1882, on procède à l’inauguration du nouvel hôtel de ville et, outre les manifestations et réjouissances prévues pour cette journée républicaine, le public est admis à visiter l’édifice communal. La foule est telle qu’il sera nécessaire de prévoir une seconde visite pour satisfaire l’ensemble des visiteurs. L’ancien Hôtel de ville étant devenu vétuste et inutile, le Conseil municipal vote sa démolition en octobre 1882. L’emplacement est ensuite nivelé et des hallettes avec terre-plein au-dessus sont aménagées.

 

Petit à petit des aménagements seront effectués dans le nouvel édifice communal : installation d’un calorifère pour le chauffage de l’ensemble des pièces, l’installation du téléphone, l’installation, en 1887, des statues de Diane et des Arts dans le jardin public, l’abattage de la rangée de tilleuls qui longeaient la ruelle Côte– Bossaye et la construction d’un mur en briques et pierres qui sera démoli en 1950 et, pour élargir la ruelle, remplacé par un muret avec grille, lui-même démonté en 1980 et remplacé par une plate-bande avec l’ouverture de la voie nouvelle René Coty.

Avec l’importance prise par la compagnie des Sapeurs-pompiers de la ville, on construit en 1895 dans le fond du jardin public, une nouvelle remise pour le matériel de plus en plus conséquent. En 1950, un autre bâtiment sera édifié pour accueillir les services incendie de la ville. Tous ces locaux seront abandonnés en 1981 par  la compagnie qui intégrera des locaux flambant neufs construits sur l’ancien champ de foire rue Jacques Fauquet.  Les besoins toujours plus importants des services administratifs et sociaux de même que ceux des divers organismes et associations de la ville nécessitant de plus en plus d’espace, l’achat de la propriété Fleury a permis, après aménagement d’y affecter certains bureaux.

Plus près de nous encore, l’agrandissement de l’Hôtel de ville et  l’achat et la transformation de la propriété Léger permettent maintenant le regroupement des services sociaux jusqu’à maintenant disséminés dans la ville et  facilitent ainsi l’accueil, les besoins et les déplacements de la population. Avec la démolition de la propriété Fleury devenue inoccupée par suite du déménagement des services administratifs et celle de l’ancienne Justice de paix pour laisser la place à la nouvelle médiathèque, le jardin public a subi d’indéniables bouleversements. Il est temps de le réaménager afin de le rendre plus accueillant en donnant au centre-ville un aspect plus agréable où il fera bon flâner.